Intériorité et foi

La vie intérieure me paraît une composante essentielle d’une foi vivante. Cultiver sa vie intérieure, c’est prendre du temps au quotidien pour s’arrêter, faire silence et entrer en relation avec Dieu au creux de l’intime. Dans les Évangiles, on voit souvent Jésus se retirer seul pour entrer intérieurement en relation avec Dieu. Ce temps d’arrêt et de silence, tout d’abord pour écouter ce que Dieu a à nous dire. Pour Lui parler aussi : Lui déposer nos tourments et nos joies, Lui demander de nous pardonner pour nos errements, de nous soutenir dans les épreuves que nous traversons, de soutenir ceux qui souffrent autour de nous et dans le monde, de nous éclairer lorsque nous avons à prendre des décisions difficiles, ou encore pour Lui rendre grâce. S’arrêter et faire silence aussi pour nous écouter et nous observer nous-mêmes, nos comportements, nos pensées et nos émotions. Par exemple, lorsque nous nous indignons face à des comportements inacceptables chez autrui, nous pouvons nous employer à observer en nous-mêmes la présence des mêmes ferments (haine, avidité, jalousie…) qui peuvent conduire à de tels comportements. C’est l’affaire de la poutre et de la paille. S’auto-observer, c’est aussi examiner en détail, avec humilité, sans complaisance ni autoflagellation inutile, nos propres sentiments, nos propres pensées, nos propres actions.

 

On conçoit donc mal une foi vivante sans cette dimension intérieure de la foi, sans ce lien personnel intime avec Dieu cultivé jour après jour à l’intérieur de soi. Mais tout ceci, n’est qu’une partie de l’histoire. La foi passe aussi par nos choix de vie, nos comportements et nos actions concrètes. C’est ce qu’on pourrait appeler la dimension pratique ou éthique de la foi. À quoi bon s’appliquer à entretenir une relation intérieure à Dieu si, dans le même temps, au quotidien, notre façon de vivre – comme personne, parent, conjoint, travailleur, citoyen, paroissien – n’est pas alignée à la Volonté de Dieu ? Dieu nous engage, non seulement à cultiver une relation intérieure avec Lui mais également à pratiquer une foi en acte. Jésus insiste tant également sur cette dimension pratique et éthique de la foi.

 

Mais il y a plus encore. La foi, comme démarche intérieure et comme conduite, n’est pas uniquement une affaire individuelle. Elle est aussi une démarche communautaire et sociale. Dieu s’adresse à nous et compte sur nous, non seulement comme personnes individuelles mais également comme communauté. La dimension collective de nos prières et de nos engagements dans l’action apporte davantage d’intelligence (il y a plus d’idées dans deux tête que dans une), de soutien (solidarité et encouragement mutuel) et d’efficacité (on va plus loin ensemble). Jésus n’a eu de cesse de souligner l’importance essentielle de cette dimension sociale de la foi. Elle implique, d’abord et avant tout, de cultiver la vie en Église, mais aussi d’œuvrer à son Royaume y compris avec des personnes et des groupes venus d’autres horizons mais qui ont la volonté d’agir dans la même direction.

 

La Bible abonde en récits qui montrent tour à tour l’importance de chacune de ces dimensions : intérieure, éthique et sociale. Et la foi passe par un alignement entre ces trois dimensions qui se nourrissent mutuellement (à défaut d’un tel alignement, on tombe dans l’hypocrisie, tant dénoncée par Jésus tout au long des Évangiles). Un alignement qui n’est jamais acquis une fois pour toute, mais qui est à examiner sans fard et à remettre sur le métier chaque jour.

 

Etienne Bourgeois

In Courants, Novembre-Décembre , paroisse de Rixensart

Image : pixabay

arrow